Des anglophiles francophones !
En effet, ça existe. Mais mettons de côté notre sarcasme de bons gaulois pendant presque 45 minutes et approfondissons le sujet. What is about ? Du premier album du groupe français These Titans Were Silent intitulé Of Hope and Rage. Vous sentez les accointances avec notre belle Gaule ? Entremêlant Post-Rock et Metal Progressif, c’est non sans le mors aux dents que ces franciliens engagés vont donc nous conter – hurler, la répression sanglante d’une manifestation pacifiste en faveur du suffrage universel masculin intervenue au début du XIXème siècle à Manchester.
Tirant son inspiration d’un poème de 1819 intitulé The Mask of Anarchy du poète romantique Percy Bysshe Shelley qui relata le massacre de Peterloo en usant de métaphores au sein d’un bal masqué à l’instar de notre Jean de La Fontaine et de ses représentations caustiques, ce premier cri de guerre en est un épitomé personnel et réinterprété. Seykhl, guitariste et parolier spécialiste de la période explique : « Il met en scène, dans un style un peu inspiré du fantastique et du réalisme magique, une soirée mondaine qu’on imaginait dans un espace ressemblant à la Galerie des Glaces de Versailles [cf. la pochette]. Tout est vu à travers les yeux d’un(e) protagoniste: un(e) serveur(se) dans la salle, qui, au fil de l’album, voit grandir sa colère face au monde dans lequel il/elle se trouve, et son espoir de le voir changer.« . These Titans Were Silent n’hésite donc pas à s’inspirer du fond comme de la forme pour cette première création, notons les titres des morceaux tirés des vers de l’œuvre anglaise. Commençons. In this ghastly masquerade débute d’une manière mélodieuse, comme annonciatrice d’une marche calme, pacifique, à la Buckethead – qui reviendra souvent, davantage féérique, romantique. Mais ne nous méprenons pas, tout est dans le titre ! L’écho du chant calme, posé, entrant presque en résonance continue de nous envoûter, agrémenté de quelques notes de guitare alternatives et un solo aux 2/3 du morceau plus incisif et Post. La suite obéit au même mouvement avec une emphase Ambiant voire Sludge. Hypocrisy on a crocodile rode (pt. 1) s’écoute comme ces longues introductions instrumentales d’un Nature Morte rallongé et d’un Placebo moins expressif où l’on peut entendre des supplices : rien n’est explicitement dit mais implicitement partagé. La frénésie se veut folie et tristesse. Que se passe-t-il ? La réponse arrive avec la seconde partie.
Hypocrisy on a crocodile rode (pt. 2) ne lésine pas sur la violence, logique, le piège vient de se refermer. Brisant cette fausse quiétude, l’introduction s’entend comme du Black Death. La voix conte avant de nous héler sa haine. Enfin ! La guitare dissonante n’arrange en rien la colère qui prendra du temps avant de s’apaiser par une fin nette et sans retour. Ajoutant des influences rappelant le plus célèbre groupe de Death Metal français dès les premières sonorités d’A maniac maid and her name was hope, la production est alors plus brutale. La guitare s’élance, signifiée par les hurlements, avant d’ajouter un liant nommé espoir. Les textes merveilleusement bien écrits y sont pour quelque chose. Le chant clair revient, comme pour nous faire prendre conscience de la tournure des évènements, appelant au ralliement prophétique de ce jour mémorable. La rythmique évolue, voulant s’extraire d’une fin déterminée : le tumulte de la rébellion, même venant de l’Albion. Tower crowned giants striding fast se veut plus modéré, peut-être un peu trop, ressemblant assez à la première partie d’Of Hope and Rage, à l’axe de l’espoir plutôt que de la rage bien que la dernière minute nous raccroche à la révolte. The Mask of Anarchy se clôt sur les vers suivants : Rise like Lions after slumber / In unvanquishable number – / Shake your chains to earth like dew / Which in sleep had fallen on you – / Ye are many - they are few, dont le premier sera repris par These Titans Where Silent. Rise like lions after slumber (pt.1) introduit quelques notes presque « alcestiennes » avant d’être surplombées rapidement par le chant. La guitare sautille et les fûts suivent, sans se fondre ni s’oublier. Les cris surviennent et l’aspect atmosphérique inspiré du jeu de Buckethead allonge l’ensemble mais de nouveau, peut-être trop. Néanmoins, Rise like lions after slumber (pt.2) étonne car plus Rock. Débutant sur un solo de basse, la suite de l’instrumentation n’arrive que progressivement avant de conclure sur le rugissement du lion britannique éveillé.
Ainsi, et bien que proposant quelques longueurs, il n’en demeure pas moins que ce tout premier album de These Titans Were Silent a su saisir l’essence de son genre en apportant sa touche poétique par un contenu nettement travaillé. God save… people !?
Liste des morceaux :
1. In this ghastly masquerade
2. Hypocrisy on a crocodile rode (pt. 1)
3. Hypocrisy on a crocodile rode (pt. 2)
4. A maniac maid and her name was hope
5. Tower crowned giants striding fast
6. Rise like lions after slumber (pt.1)
7. Rise like lions after slumber (pt.2)
Titre(s) emblématique(s) de l’album : In this ghastly masquerade, Hypocrisy on a crocodile rode (pt. 1) et A maniac maid and her name was hope.
Titre original : Hypocrisy on a crocodile rode (pt. 2)
Titre(s) dont on aurait pu se passer : Rise like lions after slumber (pt.1)
14/20